Selon Chaïtanya (1485-1534), nous sommes parvenus à la dernière étape du cycle cosmique, nous vivons la fin du Kali-Yuga[3], et la dégénérescence de l’univers est telle que toutes les règles du Dharma sont caduques, du moins pour ceux qui veulent faire leur salut. Krishna s’étant révélé divinité suprême dans la Bhagavad-Gîta[4] et ayant dit que « sont sauvés ceux qui répètent Son nom avec dévotion », il faut prendre cette parole à la lettre et gagner le Ciel en chantant sans trêve le nom du Seigneur.
Trois mots pour le salut
Ainsi fit Chaitanya qui, parcourant les routes de l’Inde, ne faisait rien d’autre que répéter continuellement les noms sacrés de Hari (Vishnu), Râma et Krishna. Tous ceux qui voulaient le suivre pouvaient le faire, sans distinction de castes : le seul fait qu’ils chantaient les noms de Dieu suffisait à en faire des brahmanes et l’on devine le scandale des brahmanes de naissance à voir de simples parias se vêtir comme eux et chanter comme eux dans la langue sacrée !
1. A la fin du troisième
des âges cosmiques[8]
Nârada s’en vint auprès de Brahmâ
et lui demanda :
« Comment, Seigneur,
» moi qui parcours la terre[9],
» pourrai-je traverser
» les affres du quatrième âge[10] ? »
2. Et Brahmâ de répondre :
« C’est une bonne question !
» Écoute donc ceci,
» qui constitue l’enseignement secret
» de l’Écriture tout entière.
» Grâce à ce secret
» tu traverseras
» le cours de l’âge Kali.
» Le mal de cet âge cosmique
» est détruit par le seul fait
» que l’on prononce le Nom sacré
» du Seigneur, Nârâyana,
» l’Esprit Original ! »
3. Nârada insista :
« Ce Nom sacré, quel est-il ? »
Et Brahmâ,
Principe universel de toutes choses[11],
lui dit ce qui suit :
4. « HARÉ RAMA HARÉ RAMA RAMA RAMA HARÉ HARÉ !
HARÉ KRISHNA HARÉ KRISHNA KRISHNA KRISHNA HARÉ HARÉ !
5. « Ce groupe[12] de seize noms divins
détruit le mal de l’âge Kali !
Dans tout le Véda,
il n’y a pas de moyen meilleur
que la récitation de ces seize Noms
pour détruire les seize plis[13]
qui enveloppent l’âme
dans sa condition terrestre !
Lorsqu’ils sont détruits,
le brahmane suprême
auquel elle est identique
resplendit
comme fait le soleil rayonnant
au moment où les nuages disparaissent ! »
6. Nârada demande encore :
« Quelle règle, Seigneur, faut-il suivre
pour réciter les seize Noms ? »
7. « Aucune ! »
rétorqua Brahmâ.
« Que l’on soit ou non
en état de pureté rituelle,
si l’on récite sans cesse
ces seize Noms, on gagne
de cohabiter avec le Seigneur,
de rester auprès de Lui,
d’acquérir même forme que Lui,
de s’unir à Lui !
8. « Si l’on récite ce mantra
trente-cinq millions de fois[14],
on efface les pires péchés,
tels que de tuer un brahmane,
de voler de l’or,
de coucher avec une femme paria !
Aurait-on même répudié
toutes les règles du Dharma
que l’on serait immédiatement[15] purifié,
immédiatement libéré ! »
Telle est l’Upanishad.